Short Description
La justice du Prophète (paix et salut à lui) apparaît encore de manière éclatante dans le fait qu’il n’infligeait jamais de punition excessive,
La justice du Prophète (paix et salut à lui) apparaît encore de manière éclatante dans le fait qu’il n’infligeait jamais de punition excessive, quelle que soit la cruauté du crime ou quelles qu’aient été les exactions commises par les autres à son encontre ou à l’encontre des musulmans.
Ubayy ibn Ka`b rapporte que lors de la bataille d’Uhud, soixante-quatre hommes des Ansâr furent tués ainsi que six des Emigrés dont Hamza, et les Quraysh défigurèrent les cadavres. Les Ansâr dirent : « Si nous avons l’occasion de prendre notre revanche, nous leur infligerons des pertes plus lourdes encore. » Lors de la prise de La Mecque, Allah révéla : « Si vous exercez des représailles, qu’elles soient équivalentes au tort qui vous a été fait. Mais si vous patientez, cela est meilleur pour ceux qui font preuve de patience. »[1] Un homme dit : « Il n’y aura plus de gens de Quraysh après ce jour. » Mais le Prophète (paix et salut à lui) dit : « Epargnez-les, à l’exception de quatre hommes. »[2]
Malgré les lourdes pertes subies à Uhud, malgré la douleur du Prophète (paix et salut à lui), ce dernier s’en est tenu à l’application de la Loi divine, sans tolérer ni souhaiter aucune exaction ni aucune vengeance.
Quant au récit relatif aux circonstances de la révélation du verset « Si vous exercez des représailles, qu’elles soient équivalentes au tort qui vous a été fait » selon lequel le Prophète (paix et salut à lui) aurait dit en voyant le cadavre de Hamza défiguré le jour d’Uhud : « Nous défigurerons soixante-dix d’entre eux », il est considéré comme faible par Ibn Hajr dans Fath al-bârî. En outre, il est contredit par le hadîth précité selon lequel le verset a été révélé lors de la prise de La Mecque et non pas lors de la bataille d’Uhud. De plus, il n’est pas dans la nature du Prophète (paix et salut à lui) de perdre son sang-froid ou de laisser parler ses sentiments aux dépens de sa raison. Et quand bien même ce récit serait vrai, il faudrait voir dans cette réaction une pensée passagère qui aurait eu tôt fait de se dissiper devant la parole divine. Le Prophète (paix et salut à lui) s’en tenait strictement à l’application du Livre d'Allah, et s’il lui arrivait de prendre une décision puis de s’apercevoir qu’un autre choix était préférable, il renonçait à sa décision initiale pour faire ce qui lui paraissait meilleur et plus juste. Le Prophète (paix et salut à lui) a dit : « Celui qui fait un serment puis se rend compte qu’il vaut mieux faire autre chose que ce qu’il a juré fera ce qui est meilleur puis expiera son serment. »[3]
Sa justice apparaît également dans le fait que rien ne pouvait le pousser à l’injustice, même s’il lui arrivait de détester quelqu’un ; une attitude conforme au verset coranique : « Que l’aversion que vous éprouvez pour certaines personnes ne vous incite pas à être injustes ! »[4]
Nous trouvons un exemple de cet attachement à la justice dans l’attitude du Prophète (paix et salut à lui) envers les deux émissaires de Musaylima le menteur : ces deux émissaires proclamaient ouvertement qu’ils croyaient en Musaylima le menteur et adhéraient à sa religion, c’est-à-dire qu’ils faisaient partie des renégats dont le sang est licite. En effet, le Prophète (paix et salut à lui) a dit : « Il n’est pas licite de verser le sang d’un musulman qui atteste qu’il n’est de dieu qu'Allah et que je suis le Messager d'Allah, sauf dans trois cas : l’adultère, l’application du talion, ou le cas d’un renégat qui a quitté la communauté. »[5]
Tel est le statut du renégat qui a quitté la religion et la communauté : or ces deux hommes n’étaient pas seulement des renégats, ils ne s’étaient pas contentés de quitter la communauté, mais ils appelaient ouvertement à la sédition en incitant les gens à suivre Musaylima. Ils étaient venus proposer un marché à Mohammad pour qu’il partage son statut de prophète ou y renonce. Si donc quelqu’un avait obéi à ses passions et pris en considération les seuls intérêts sans considérer les prescriptions de l’islam ni la justice, il les aurait assurément tués. Mais le Prophète (paix et salut à lui) a épargné leur vie, malgré les circonstances, parce qu’ils étaient des émissaires et que l’usage voulait que les émissaires ne soient pas tués, une pratique entérinée et confirmée par l’islam. Le Prophète (paix et salut à lui) dit aux deux émissaires renégats : « Par Allah ! si ce n’était que l’on ne doit pas tuer les émissaires, je vous aurais frappé le cou ! »[6]
Ni le fait que les deux émissaires étaient des renégats, ni qu’ils étaient mécréants, ni le danger qu’ils représentaient, n’a poussé le Prophète (paix et salut à lui) à être injuste envers eux ou à commettre une agression. Au contraire, il leur a garanti la sécurité et les a traités avec la plus grande courtoisie. Il a continué à suivre la voie droite malgré l’hostilité de ses ennemis, malgré aussi le fait que Musaylima lui-même avait assassiné un émissaire du Prophète (paix et salut à lui), Habîb ibn Zayd, en le mettant littéralement en pièces.
Tous ces exemples montrent parfaitement la justice du Prophète (paix et salut à lui) et le fossé existant entre la voie de l’islam et les autres voies, permettant à chacun de reconnaître la vaste différence entre la Loi du ciel et les lois terrestres.
Au moment de conclure ce chapitre important sur les relations du Prophète (paix et salut à lui) avec les non-musulmans et sa pratique de la justice, il nous paraît utile de citer encore un dernier exemple, peut-être plus étonnant encore que ceux cités précédemment.
Il s’agit du comportement du Prophète (paix et salut à lui) envers les juifs qui lui avaient donné de la nourriture empoisonnée dans le but de le tuer, après la conquête de Khaybar.
Abû Hurayra (qu'Allah l’agrée) rapporte que lorsque Khaybar fut conquise, on offrit au Prophète (paix et salut à lui) à manger une brebis dont la viande avait été empoisonnée. Le Prophète (paix et salut à lui) dit : « Faites venir tous les juifs qui étaient présents. » On les rassembla et il leur dit : « Je vais vous poser une question, me répondrez-vous la vérité ? » Ils répondirent que oui. Le Prophète (paix et salut à lui) leur demanda : « Qui est votre père ? » Ils répondirent : « Untel. » Il leur dit : « Vous mentez, c’est untel. » Ils dirent : « Tu as raison. » Puis il leur demanda : « Me direz-vous la vérité si je vous pose une autre question ? » Ils répondirent « Oui, Abû al-Qâsim, car si nous mentons tu t’en rendras compte comme tu as su qui était notre père. » Le Prophète (paix et salut à lui) leur demanda : « Qui sont les hôtes de l’Enfer ? » Ils répondirent : « Nous y resterons un peu puis vous nous y remplacerez. » Le Prophète (paix et salut à lui) répondit : « Restez-y ! Par Allah, jamais nous ne vous y remplacerons ! » Ensuite, le Prophète (paix et salut à lui) demanda : « Avez-vous mis du poison dans cette brebis ? » Ils répondirent que oui. Il leur demanda alors : « Qu’est-ce qui vous a poussés à faire cela ? » Ils répondirent : « Nous avons voulu être débarrassés de toi si tu étais un menteur, en nous disant que si tu étais un prophète cela ne te nuirait pas. »[7]
On voit comment le Prophète (paix et salut à lui) interrogea calmement les juifs qui avaient mis au point un plan pour l’assassiner. Il argumenta avec eux jusqu’à ce qu’ils avouent eux-mêmes avoir organisé la tentative d’assassinat. Le Prophète (paix et salut à lui) s’aperçut que ces gens avaient ordonné à une femme juive de mettre elle-même le poison dans la viande et de l’apporter au Prophète (paix et salut à lui). Les hommes avaient mis au point le plan tandis que la femme avait exécuté l’ordre et commis le geste.
Avant de lire quelle fut la réaction du Prophète (paix et salut à lui) à ce complot, arrêtez-vous un instant pour réfléchir à ce qu’auraient fait d’autres dirigeants, princes ou rois, et comment ils auraient réagi si des complots avaient été montés pour les tuer ! Dans de telles circonstances, les dirigeants auraient au moins fait tuer l’exécutant, le commanditaire, mais aussi tous ceux qui étaient au courant et d’accord… Ils auraient fait porter la faute d’un seul à tous les habitants du lieu. C’est ainsi, sans exagération, que les choses se passent.
Mais que fit notre Prophète (paix et salut à lui) ?
Les Compagnons (qu'Allah les agrée) proposèrent au Prophète (paix et salut à lui) de tuerla femme. Maisil refusa en disant que ce n’était qu’une tentative de meurtre, et qu’aucun meurtre n’avait vraiment eu lieu. Dans ces conditions il n’était pas licite de tuer la femme.
En outre, le Prophète (paix et salut à lui) ne lui infligea aucune punition, pas plus qu’aux juifs qui avaient commandité la tentative d’empoisonnement. Il accepta en effet leur argument selon lequel s’il était un menteur ils auraient été débarrassés de lui et s’il disait la vérité cela ne pourrait pas lui nuire.
Le Prophète (paix et salut à lui) accepta cet argument alors même qu’aucun d’eux ne déclara sa foi, ce qui montre bien qu’ils n’avaient pas agi ainsi dans l’espoir de connaître la vérité mais bien par jalousie et par haine du Prophète (paix et salut à lui).
Malgré tout cela, il ne les punit pas…
Cependant, l’un des Compagnons, Bishr ibn al-Barrâ’ ibn al-Ma`rûr (qu'Allah l’agrée), avait consommé avec le Prophète (paix et salut à lui) de la viande empoisonnée, et il en mourut : alors seulement, le Prophète (paix et salut à lui) fit tuer la femme en application de la loi du talion, mais il ne tua avec elle aucun autre habitant de Khaybar. Le qâzî `Iyâdh dit à ce propos : « Initialement, le Prophète (paix et salut à lui) ne l’avait pas tuée lorsqu’il découvrit son poison et refusa de la tuer lorsqu’on le lui suggéra. Mais lorsque Bishr ibn al-Barrâ’ mourut de ce même poison, il la remit à ses ayant-droits qui la tuèrent en application de la loi du talion. »[8]
Comment les dirigeants du monde, dans l’Histoire, auraient-ils traité quelqu’un qui avait comploté de les tuer ? Quelle aurait été la réaction de ces dirigeants devant le meurtre de leurs compagnons ou de leurs proches ?
La comparaison met en lumière les différences.
Aucun habitant de la terre ne peut comparer la morale du Prophète (paix et salut à lui) avec celle d’aucun autre être humain : la morale des gens ordinaires et la morale d’un prophète ne sont pas sur le même plan.
« Il y a certes là un rappel pour les êtres doués d’intelligence. »[9]
[1] Sourate 16, an-Nahl, verset 126.
[2] At-Tirmidhî d’après Ubayy ibn Ka`b (3129), Ibn Hibbân (487), al-Hâkim (3368), al-Bayhaqî dans Shu`ab al-îmân (9704), an-Nasâ’î dans ses Sunan al-kubrâ (11279). Selon at-Tirmidhî, c’est hadîth bon isolé. Selon al-Hâkim, il est authentique de par sa chaîne de transmission, mais non cité par les deux cheikhs. Adh-Dhahabî le confirme, et al-Albânî le classe comme bon et authentique de par sa chaîne de transmission.
[3] Rapporté par Muslim d’après Abû Hurayra, Livre des serments, chapitre : « Le vœu de celui qui a fait un serment puis se rend compte qu’une autre action est meilleure » (1650) ; ainsi que par Abû Dâwud (3274), at-Tirmidhî (1350), an-Nasâ’î (3781), Ibn Mâjah (2108) et Ahmad (8719).
[4] Sourate 5, al-Mâ’ida, verset 8.
[5] Al-Bukhârî d’après `Abdallâh ibn Mas`ûd, Livre des compensations, chapitre de la Parole divine : « Une vie pour une vie » (6484) ; Muslim, Livre des serments, chapitre : « Dans quels cas il est licite de verser le sang d’un musulman » (1676) – la variante donnée est celle de Muslim.
[6] Rapporté par Abû Dâwud (2761) ; par al-Hâkim (2632) qui le déclare authentique selon la norme de Muslim mais non cité par les deux cheikhs ; ainsi que par Ahmad (16032). Déclaré bon par al-Albânî. Voir Sahîh al-jâmi` (1339).
[7] Al-Bukhârî, Livre de la médecine, chapitre : « Ce qui a été dit de l’empoisonnement du Prophète (paix et salut à lui) » (2998) ; Abû Dâwud (4508) ; Ahmad (9826).
[8] An-Nawawî, Sharh Muslim 14/179.
[9] Sourate 39, az-Zumar, verset 21.
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